Lundi 21 décembre dernier, un container à destination de Nouakchott, en Mauritanie, et ses environs, est parti du Breil, après s'être fait remplir à ras bord, grâce à la participation de jeunes Breillois, motivés par Abder Ba, animateur à la maison de quartier. Au cul du camion, il y avait du matériel médical, scolaire, sportif et ludique, à l'attention des villageois de ce pays d'Afrique de l'Ouest.
jeudi 31 décembre 2020
QUAND LES TATAS SE FÉDÈRENT CONTRE LA MISÈRE
Avec son association Flam'Africa, Alassane Guissé, accessoirement élu de quartier et 25è adjoint à la maire, en charge de la coopération décentralisée, organise la première édition de la Marmite du Cœur. Pour le dernier dîner de cette satanée année, des cuisinières africaines se sont liguées pour préparer des centaines de repas à des familles monoparentales précaires et des personnes vivant en squat ou à la rue, recensées en amont. Jeudi 31 décembre, une cinquantaine de familles au Breil, une centaine aux Dervallières, d'autres à Bellevue ou Malakoff et jusqu'à Thouaré et St Séb, se verront offrir un yassa ou un mafé concocté par ces marraines solidaires : Tata Maguette Sylla, Lisa Gueye, Aida Seck ou encore Mariama Baldé, restauratrices de l'agglo nantaise. Qu'est-ce qu'on dit ? Merci aux tatas (et aux tontons qui livrent) !
lundi 28 décembre 2020
MORNE EFFERVESCENCE SUR PLAISANCE
C'est un
quartier qui a vécu. Moi aussi, de 1973 à 1979*. Plaisance est en
passe de renaître : situé à Orvault, à l'orée de Nantes,
c'est un quartier dit « prioritaire de la politique de la
ville » qui amorce aujourd'hui sa mue. N'en déplaise à
certains « Plaisanciers » qui font la moue. Topo(logie).
Photo d'archives procurée par la Mairie d'Orvault. |
Un vendredi midi de novembre 2020, semi-reconfinés, il n'y a forcément pas foule dans l'allée de 500 mètres qui relie la tour, ce monstre de béton, le Trieux, au centre commercial bordant la cité et débordant sur un arrêt de tramway. « Trieux » est un mot wallon, issu du moyen néerlandais signifiant « jachère, friche ». Le terme aurait évolué pour désigner une prairie, située au centre du village et prenant diverses formes, rectangle ou triangle. Un étang y était souvent présent. C'était aussi le lieu où se tenaient les foires, kermesses et autre fêtes, en dit Wikipedia. C'est aussi le nom d'une rivière bretonne qui aurait pu léguer le sien à cet ensemble, plus logique puisque des rues alentour portent des noms de fleuves.
Ici, c'est Plaisance, 2500 habitants, dont une partie a été relogée ces deux dernières années. Un calme provincial y règne, les espaces verts sont bien entretenus, pas un papier à terre, pas une carcasse de scooter en vue. La ligne d'horizon est basse, si l'on fait fi de l'immense barre qui en barre la vue.
On ne croise ce matin-là que trois personnes de l'heure : un quidam parti se ravitailler en jaja à l'Aldi du coin, accompagné de son chien ; une jeune mère et son gosse, elle canette de boisson énergétique dans une main, cigarette dans l'autre, jupe longue sur leggins et combo claquettes (en moumoute)/chaussettes (de sport) ; un jeune capuché faisant le guet sous un arbre, l'endroit en est plein, de conifères et autres saules.
Pris en
sandwich entre l'affreuse et industrieuse route de Vannes et une coulée verte menant
aux jolis parcs de la Gobinière et de la Gaudinière, Plaisance fut
érigé en 1964 pour loger des familles de la classe laborieuse. Le
Trieux comprenait 108 appartements répartis sur 11 étages, pour une
surface de plancher de 1095 m2. Aujourd'hui, on démonte la bête,
amiantée jusqu'aux os.
Du 9 décembre 2020 au 8 janvier 2021, le bâtiment, propriété du bailleur social Atlantique Habitations, est démoli. Pour marquer l'événement, la mairie d'Orvault organisait une déambulation animée par deux échassiers à l'accoutrement style carnaval de Venise, et une fanfare, les Bouyaka Horns, dont le son fait penser à celui de la Nouvelle Orléans. C'était vendredi 18 décembre. Entre chien et loup, le Trieux déjà à moitié grignoté, impression fin du monde accentuée par la grisaille automnale et une année pas banale, le jazz band s'est mis en branle pour ambiancer les allées de la cité : élus et médiateurs de quartier ont vu des Plaisanciers à leurs fenêtres, applaudissant l'initiative, tous sourires.
En 2005, le plan urbanisme de Nantes Métropole avait tenté d'améliorer le cadre de vie, en plantant sur l'immense terrain en bas des tours, cages à buts, city-stade, terrain de pétanque, barbecues et tables de pic-nic, une aire de jeux pour enfants, au beau milieu d'une pelouse qui ferait verdir d'envie bien des citadins. Et, cet été, pour célébrer le renouveau de Plaisance, des animations avec des artistes graffeurs avaient été organisées par la mairie.
Un parallèle avec le Breil, en éveil
Claire Beauparlant, sociologue urbaine de l'agence 53 TER, auteure de la synthèse sur la concertation citoyenne menée en 2019 avec les habitants du Breil (autre QPV de l'agglo nantaise), autour de la refonte du quartier, devenue une urgence après les dégâts causés par les émeutes de 2018, se demande : « Comment (re)faire avec l’existant ? Où construire, où ne pas construire ? Comment améliorer la visibilité et l’accessibilité aux services de proximité ? Ce travail se poursuit et l’équipe d’étude élabore actuellement des scénarios en s’appuyant sur ce travail fait avec vous, sur son expertise, ainsi que sur les orientations données par la Ville et la Métropole.» Le cahier d'étude Cœur du Breil est consultable via le lien suivant : https://dialoguecitoyen.metropole.nantes.fr/media/default/0001/01/7b820a2744bb6543a8fcf771d0e16813dce44dae.pdf
En tant qu'experte, elle juge que "la tour n'est pas toujours infernale, cela dépend de la typologie de sa population". En clair, Claire trouve que la promiscuité n'est pas nécessairement source de conflit, que ce qui l'est, c'est la juxtaposition de situations problématiques liées à la précarité, les toxicomanies, la violence, la délinquance, le manque d'éducation à la parentalité, à l'écologie...
Au Vietnam ou aux Emirats arabes, des tours vertigineuses s'érigent toujours plus denses en population, sans qu'on n'entende parler d'émeutes en ground zero... Le secret du "bon vivre ensemble" résidant probablement dans une isolation phonique performante.
Que demande le peuple ?
Ce qu'il faut retenir des desiderata des premiers concernés, que ce soit au Breil ou à Plaisance, ce sont des envies de désenclavement (« ouvrir le quartier sur la métropole »); de davantage de mixité sociale avec l'incorporation des seniors, toujours plus nombreux (les dernières prédictions démographiques de l'Insee, datant de 2018, établissent que d'ici 2050, plus d'un quart des habitants des Pays de la Loire seront âgés d'au moins 65 ans); de potagers collectifs et autres composteurs publics; un nouveau parc, voire un skate park et des pistes cyclables; la création de lieux générateurs de liens comme des espaces de convivialité tel un café-théâtre ou un bar, une salle de sport; une salle de gaming; un petit marché, un restaurant ou un food truck?
Et puis, une envie d'ouvrir le quartier aux gens de l'extérieur sous la forme d'un festival; au Breil, on réclame une mosquée, du moins une salle de prière puisque les locaux un temps envisagés pour abriter le lieu de culte sont voués à la démolition (www.mosqueedubreil.fr/).
En attendant de voir quelques-unes de ces idées concrétisées, on projette de reconstruire, sur les ruines du Trieux, de nouveaux immeubles, mais étalés à l'horizontale, car il faut bien loger une population croissante. Johanna Rolland, maire de Nantes et présidente de Nantes Métropole, rappelait début décembre 2020 dans l'émission Grand Angle sur Télénantes, que « l'objectif est de 6000 logements par an, 2000 en habitat social. ».
Un nouveau centre socioculturel pour accueillir les jeunes, une maison pour seniors, une crèche et une ressourcerie relogée sont attendus sur place dans les 3 ans à venir.
Dans la veine de ce que le philosophe et prof d'urbanisme, Thierry Paquot, nomme « désastres urbains », le PGB, ou projet de rénovation du Grand Bellevue (plus grand QPV de l'agglo avec 19 000 habitants) prévoit, quant à lui, de détruire 525 logements sociaux pour en reconstruire un millier, privés, d'ici à 2030.
Un ressenti oscillant entre nostalgie et envie d'ailleurs
Les derniers occupants du Trieux en seraient partis début 2019, si les souvenirs de Geneviève L. sont bons. Celle que les enfants de la cité appellent encore « Mamie », rapport à son ancienne fonction de dame de cantine à l'école de la Ferrière, y habite depuis 2013. Elle fait partie de l'UHP, l'Union des Habitants de Plaisance. Union qui n'a plus de président et dont Geneviève ne saurait dire combien elle compte d'adhérents. Elle assure la permanence bénévole d'accueil d'une ressourcerie-signe des temps : logé à titre gracieux dans le garage en sous-sol de l'ancienne antenne du bailleur social Atlantique Habitations, l'endroit est un triste capharnaüm dédié à la précarité. On y trouve un distributeur de protections périodiques, et puis de tout et n'importe quoi. Pour 5 euros l'an, les familles peuvent s'y servir à volonté en vêtements, livres, vaisselle, jouets, mobilier...
Quelques kilos en trop, quelques chicos en mois, Geneviève bougonne et ne veut pas être photographiée. Elle veille ce jour-là sur le fils d'une voisine, un ado qui « a pété un câble hier au collège ». Elle appelle sa collègue : « P'tite mère, on a ce frigo, j'ai pensé qu'on le mettrait de côté pour untel ? ». L'autre caractère de ce binôme picaresque, c'est Claudette C., 78 ans dont 42 à Plaisance, qu'elle définit, sans y voir de jeu de mots, de « plaisant ». « Mais c'était mieux avant », détaille-t-elle : « c'est pas question d'être raciste mais à partir du moment où les Maghrébins sont arrivés, ça a été le bazar », est-elle persuadée. Les Maghrébins étaient pourtant déjà là, même « avant ». Et d'enchaîner sur les Africains, « qui ne vivent pas comme nous, c'est sûr », et dont il paraît que deux familles louant des appartements sur le même palier auraient enlevé les portes entre les deux, rendant la vie impossible à leurs voisins de cage. Puis vient le tour des Roumains, résidant « en masse » au Lay, ensemble de petits collectifs à 4 étages posé de l'autre côté de la rue : eux « marient leurs filles à 14 ans, et ça, ça me choque », se répand l'assistante maternelle retraitée, squeezée à la base sur ses impressions liées au changement. On se mariait au même âge dans les campagnes françaises il n'y a pas si longtemps. Leurs opinions, si elles n'engagent qu'elles, reflètent une propension à la complainte, elle bien française. « S'ils veulent récupérer les lieux, qu'ils le fassent donc, moi je laisse tout et je m'en vais, j'ai d'autres choses à faire », s'emporte l'une d'elles, approuvée par l'autre. « De toute façon, un jour je partirai habiter à la campagne... », se prend à rêver Claudette. Reste que ces personnages donnent de leur temps et de leur énergie à leur communauté sans compter, solidaires de galère.
L'avenir de la ressourcerie est incertain, le local étant voué à la démolition dans les 18 mois, renseigne Lionel Audion, adjoint au maire délégué à la politique de la ville, qui parle d'une relocalisation dans le Plaisance nouveau. En attendant, la Mairie a déjà investi l'étage au-dessus de la ressourcerie pour y loger la Passerelle, service de médiation municipale, signe que l'institution va vers les « cas soç' », euh pardon les habitants. L' « aller vers » est un concept d'éducation populaire que les travailleurs sociaux se targuent d'appliquer aux quartiers laids (par opposition aux beaux quartiers) et qui est explicité ici : https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/note_de_cadrage_aller_vers.pdf
*Note De La Rédactrice
L'accouchement de ma mère aurait été déclenché par une panne d'ascenseur, un vendredi 13, si l'on en croit la légende familiale. Elle avait dû monter 11 étages à pieds. Cette adresse du 3, allée du Trieux fait affleurer mes tout premiers souvenirs : les repas pris dans la cuisine avec vue sur le ciel ; mon père faisant mine de me lâcher, à la Michael Jackson, par dessus le balcon, pour rire... La voix de George Benson résonnant dans tout l'appart' tapissé de grosses fleurs orange et marron ; la Renault 12 noire paternelle trônant sur le parking en bas et, moi, descendant les 5 étages qui me séparaient de ma nounou les matins où ma mère partait travailler au Codec à l'époque. En chemise de nuit et chaussons, je tenais mon bol de Poulain dans l'ascenseur, Tatate n'avait plus qu'à le remplir de lait chaud...
J'arbore encore une cicatrice au menton, stigmate d'une dégringolade à vélo dans la pente reliant les lieux au centre commercial, où, chez le boucher, je n'avais droit à une sucette qu'à condition de ne pas en réclamer : 'on ne réclame pas', disait Tatate, octogénaire aujourd'hui, et dont le mari, André Monnier conduisait une Ami8... Le pauvre homme est décédé dans les années 1980 d'un cancer des poumons. Il n'avait jamais fumé.
Ma mère, sur le balcon du 11ème étage au 3, allée du Trieux à Orvault, circa 1977.
Pour la kermesse à la fin du CP à la Ferrière, on nous avait grimés en Noirs, et personne n'aurait pensé s'en offusquer. On trouvait bien des 'têtes de nègres' à la boulangerie, en confiserie réglissée ou en pâtisseries qu'on a renommées 'boules choco' depuis. Autres temps, autres moeurs, dit-on. Plus tard, sans même que ce soit un projet, je vivrai dans un pays arabo-musulman d'Afrique et y donnerai la vie. A la ressourcerie de Plaisance, fin 2020, j'ai laissé un sac rempli de jouets avec « Casa » écrit dessus. Mektoub.
Et après ?
Maître Michèle Raunet, notaire, témoigne dans la revue Trajectoires, publiée en décembre 2020 par l'Observatoire du Logement de la Métropole Atlantique (Oloma) : « On ne peut plus se permettre d'avoir des bâtiments qui, une fois obsolètes, ne peuvent être transformés autrement qu'en étant démolis. L'impact environnemental est trop fort. L'évolution du monde nous oblige à repenser notre façon de construire. » L'ouvrage nous apprend enfin que les Pays de la Loire devraient abriter, d'ici 2050, selon l'Insee, 4,6 millions d'habitants, et ce, sans compter d'éventuelles arrivées massives de populations fuyant leur pays d'origine pour des raisons politiques ou climatiques...
Nantes Métropole prépare un projet intégrant la collaboration « des collectivités et du bailleur social qui ont défini un programme de réhabilitation, démolition et construction de logements permettant de diversifier le parc actuel, avec la création d’appartements dédiés aux personnes âgées et aux jeunes actifs, des logements en accession abordable et d’autres à prix libre ». Le tout s'appuyant sur une concertation citoyenne préalable, tenue en 2019, et « facilitée » par l'agence Passagers des Villes. Le diagnostic et les perspectives ont été rendus sous forme de dessins dédramatisant les enjeux et les tensions qu'ils suscitent, mais qui ont le mérite d'atténuer la complexité liée au consensus recherché.
Avec la disparition du Trieux, une
page se tourne, marquant la fin d'une histoire, le début d'une
autre, différente, plus belle... Pourvu que le 21ème soit réellement porteur de changement de paradigme pour que de telles
aberrations architecturales et sociologiques ne se reproduisent plus.
https://metropole.nantes.fr/actualites/2019/logement-urbanisme/plaisance-nouveau
samedi 19 décembre 2020
UNE BOUTIQUE AFRICO-CHIC (ÉPHÉMÈRE) À TALENSAC
Vous avez jusqu'au 30 janvier 2021 pour dégoter robes, jupes-pagnes réversibles, tops en satin gansés de wax, snoods, bijoux fantaisie, sacs, accessoires capillaires, objets de déco (housses de coussins, housses à abat-jour, bibelots, dont beaucoup sont made in Senegal) chez Art Win & Fire, au 2, rue de Talensac. 3, 2, 1, prêt, shoppez!
LA LETTRE À LULU A 25 ANS (ET TOUJOURS LA DENT DURE)!
Un quart de siècle que cet irrégulomadaire irrévérencieux nous permet de nous esclaffer sur l'actu locale, et par les temps qui courent (crise de la presse + crise du Corona), ce n'est pas rien! Bon anni l'amie!
ET SI ON SHOPPAIT DES CHAMPI DANS UNE CHAPELLE?
C'est à la Chapelle du Martray, dans une ruelle perpendiculaire à la rue Jean Jaurès, entre Viarme et Talensac, que l'on peut se procurer des shitakés made in Nantes. On n'arrête pas le progrès ma parole!
DES TALENTS D'ICI CREUSENT UN SILLON POUR LA BONNE CAUSE...
Comme pour la 1ère édition de PARAGES x P(ART)AGES, le Secours populaire a souhaité valoriser l’accès à la culture sous de multiples form...

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Cette nouvelle « cantine du Sud » a ouvert cet été dans le centre. Autant le dire d'emblée, le verdict est aussi bon que l...
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