vendredi 6 juillet 2018

C'est arrivé près d'chez toi, ouais, presque sous ton nez, cesse de prendre cet air étonné, pas le moment d'abandonner, faut tout donner, afin d'changer les données...*

Ici, pas d'images de véhicules incendiés, de commerces calcinés ni d'émeutiers masqués.




Vue sur la rue de l'Ehpad des Dervallières au lendemain de la mise à sac du quartier: "jusqu'ici tout va bien".
Au lendemain de la marche blanche dédiée à Aboubakar, tué mardi 3 juillet 2018 par un policier, une maman réarrange l'affiche élaborée par des jeunes du Breil, Nantes, le 6 juillet 2018.







ATTERRES MAIS PAS A TERRE



Le 5 juillet, une réunion de crise s'est tenue à la Maison de quartier des Dervallières en présence de la maire de Nantes, Johanna Rolland et des habitants, choqués. Ali Rebouh, adjoint de la maire chargé des sports, élu ayant lui-même grandi dans le quartier, a déclaré: " Nous sommes abattus mais debout".

Deux questions se posent: jusqu'où ira la violence et est-elle seulement l'expression d'une jeunesse en colère suite à une énième bavure?...



*Paroles d'une chanson du Suprême NTM extraite de l'album éponyme datant de 1998!




lundi 2 juillet 2018

MILLÉNIUM BLUES, LE DERNIER FAÏZA GUÈNE: TOUJOURS LA MEME (JOLIE) RENGAINE

J'aimais bien cette auteure à ses débuts : avec Kiffe kiffe demain, qui la révéla comme écrivaine prodige en 2004 (elle avait 19 ans), puis avec du Rêve pour les oufs en 2006 ou encore les Gens du Balto en 2008, elle nous avait habitués à un discours nouveau, simple et efficace.


Le problème, c'est que sa particularité, de rendre littéraire la langue des cités, s'est galvaudée depuis que tout le monde parle kaïra (Cyril Hanouna apostrophant ses collègues à base de « frérot » ou, véridique, Sophie Davant disant de Brigitte Macron qu'elle est « gaulée grave »). Et puis, à l'instar d'une Virginie Despentes, la gouaille cultivée finit par être fatigante.





« Le monde a changé à partir du forfait Millénium. Désormais, on se parlerait sans limites. On pourrait se dire autre chose que l'essentiel. La jeunesse devenait Millénium, le monde sous nos yeux, était en train de devenir Millénium. J'ai le Millénium Blues. Vous l'avez aussi ? Est-ce qu'on en guérira un jour ? ».


Ça, c'est la promesse de la quatrième de couverture. Convenons que ça a le mérite de donner envie. Alors j'ai plongé dans cette biographie déguisée : l'histoire d'une jeune femme, de ses parents, de sa meilleure amie qui cause un accident de la route mortel, de sa grossesse, son accouchement, sa rupture avec le père de son enfant, de son statut de nouvelle mère célibataire ayant échappé à la coupe d'un pervers narcissique (on en est toutes plus ou moins là), bref, la vie, quoi, émaillée de chocs collectifs qui ont marqué les vingt dernières années : la coupe du monde 98, le 11 Septembre, l'affaire DSK, le tout saupoudré d'une playlist (heureusement inaudible) d'Abba et de références discutables comme Charles Ingalls en guise d'homme idéal.


Les +++ :
Un chapitrage rapide, on peut lire une ou deux pages vite fait, comme on grignoterait des chips, sauf que les chips ont un goût de revenez-y qu'on ne trouve pas ici : on a plutôt envie d'en finir et vite.


Une galerie de personnages bien dépeints : « Elle a des cheveux brillants qui ont l'air propres et brossés, et c'est évident qu'elle ne frise pas sous la pluie. Ses deux rangées de dents sont si blanches et alignées que si Chopin était en vie, il se précipiterait sur elle pour jouer son Concerto pour piano en fa mineur. Tatie a aussi des mains délicates, des yeux où le vert et le marron se mêlent si bien qu'on dirait du miel, elle n'a pas de cellulite, pas une vergeture, et pas la moindre ride. (Pas de cul non plus d'ailleurs, mais plutôt un truc qu'on pourrait qualifier de dos prolongé). »


Photo tirée de la page FB de la Grande Librairie


Les - - - :
L'usage récurrent des parenthèses, qui donne un style de chronique de magazine féminin assez énervant, de par la fausse connivence que cet élément de ponctuation tente d'instaurer avec sa lectrice en l'invitant à des apartés de copinage puéril (vous me suivez ou pas?).

Une coquille, page 197, impardonnable en littérature : « -Un tien(!) vaut mieux que deux tu l'auras ! ».

Pas moins d'une demi-douzaine de formules creuses définissant la vie, genre de périphrases qu'on trouvait gravées aux portes des toilettes au collège, ou plus récemment sur les murs Facebook :
Page 62 : « La vie est un drame ponctué de joies. »
Page 110 : « La vie n'est rien d'autre qu'une tornade menaçant de tout emporter. »
Page 127 : « Si seulement on vivait tous comme est mort the falling man. Si on allait au-devant de la vie, tête la première, si on sautait, si seulement on vivait éperdument. »
Une conclusion bateau digne d'une copie de mauvais élève : « Car, oui, la vie mérite d'être fêtée. Il faudrait célébrer la vie qu'on nous donne à vivre et ne pas en faire n'importe quoi. » Sérieusement?


Et puis, perdu au milieu du livre, un texte de 4 pages intitulé "Une vie simple", résonne comme une fulgurance poétique, de sa lucidité triste qui contraste avec les jeux de mots faciles et pas drôles donnés au titre des deux parties : "LE PASSÉ (décomposé)" et "LE PRÉSENT (est un cadeau)". Faïza a fait un stage au service comm' de Monoprix ou quoi?


Et puis, au chapitre "REFAIRE SA VIE: Est-ce qu'il existe une expression plus stupide que ça? On ne refait jamais sa vie. On la continue, tant bien que mal, en boitant, la figure pleine de cicatrices." Ouch!


Il y a certes beaucoup de talent là-dedans mais réparti trop inégalement.

Millénium Blues, Faïza Guène, Fayard, 2018, 232 pages (à lire à la plage).

DES TALENTS D'ICI CREUSENT UN SILLON POUR LA BONNE CAUSE...

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