jeudi 25 mars 2021

2021 COMMENCE BIEN...

 On a lu pour vous Blanche de Catherine Blondeau, qui "traite" de la (non) couleur de peaux.

Catherine Blondeau est nouvellement auteure, signant son deuxième ouvrage. Nantaise d'adoption, la directrice du Grand T aborde un sujet brûlant d'actu'.

En 2004, Jean-Louis Sagot Duvauroux publiait « On ne naît pas Noir, on le devient ». Catherine Blondeau, ex-professeure de lettres originaire de Rouen, ayant dirigé un institut français en Afrique du Sud, est devenue blanche dans le regard de l'Autre, au contact des populations de la « nation arc-en-ciel ». Pour savoir ce que signifie être blanche aujourd'hui, elle opère (et se perd) dans une opposition binaire : pour elle, être blanche équivaut clairement à ne pas être noire.

Dans son récit de vie, elle récite, bonne élève, les noms des figures de la culture noire mondiale contemporaine. Les épisodes marquants de sa vie s'enchaînent en courts chapitres, agréables à lire, impeccablement rédigés : enfance, éducation, carrière, déménagement, cambriolage, mariage, divorce y sont évoqués dans une chronologie plus ou moins respectée, prétexte à glisser ici du Glissant, à invoquer Fanon là... Elle s'essaie même à un pastiche de Césaire assez réussi quoique périlleux. Catherine Blondeau aurait les félicitations du jury : elle a lu tous les livres, vu tous les films, écouté tous les disques et bien appris sa leçon. Si son discours sonne juste, sa vision est biaisée.

« Quand je croisais des gens à la peau plus foncée, je les remarquais. Leur différence m'intriguait. Leur histoire m'intéressait. Rien de tout cela ne faisait de moi une Blanche. Les personnes de couleur, c'étaient les autres. Moi, je n'étais d'aucune couleur particulière. Je n'avais rien de spécial. »

Pour ceux que ça intéresse (et comment ne pas s'y intéresser à l'heure de BLM, des restitutions, de la cancel culture ?), ils apprendront beaucoup auprès de cette enseignante dans l'âme. Pour les autres, ça ressemble à une tentative de les convaincre, et quand le racisme, bien que délictueux, s'exprime à la fois dans les urnes et en ligne, l'essai est à saluer. Malgré sa bonne volonté, la conscientisation raciale de cette Française née dans les années 1970 vire à l'obsession. Signe des temps, la radicalité, même bien pensée, peut faire tourner au vinaigre les meilleures intentions.

L'intérêt de son texte réside plus dans la bibliographie (qu'on eût aimé voir compilée en fin d'ouvrage) que dans sa narration, même si elle s'avère nécessaire. On lui concédera un vrai style, et c'est là l'essentiel : une écrivaine pas vaine est née. 


 

Mémoire d'encrier, sa maison d'édition canadienne, est spécialisée dans la mise en avant des voix authentiques du monde. Mission accomplie ici. Avec humour en sus : l'image de couverture, un caméléon peint, s'intitule « quand on a de trop belles couleurs, on est souvent les plus dangereux. »

Avec ce récit inspiré et inspirant, Catherine Blondeau a terrassé avec brio le syndrome de la page blanche sur un sujet archi touchy. Le courage et le cœur qu'elle y a mis font plaisir à lire.

Extrait : « Et dire qu'on aura passé des décennies à enseigner à des petits Congolais et des petites Sénégalaises que leurs ancêtres étaient Gaulois, alors qu'il aurait fallu apprendre aux petits Français que leurs ancêtres gaulois étaient les descendants d'êtres humains partis à pied des alentours du Grand Rift, à l'est de l’Afrique, il y a plusieurs centaines de milliers d'années. »

Blanche de Catherine Blondeau, éditions mémoires d'encrier, 2021, 248 pages, 19 euros.

 

mardi 23 mars 2021

ECLOSION DE TITRES SECOND DEGRÉ DANS LES RUES

 

Spottées avec l'arrivée du printemps dans les artères nantaises, ces affichettes imitant les titres de unes du quotidien Ouest-France, issues d'un obscur média parodique baptisé Ouest Rance, sont plus ou moins drôles, mais ont le mérite de faire sourire, occurrence rare par les temps qui courent. Et puis, comme le chantait Henri Salvador: "faut rigoler, faut rigoler, avant que le ciel nous tombe sur la tête...".


SÉLECTION UN AUTRE REGARD

 

Une visiteuse contemple une œuvre d'art chez Afikaris, à Paris, en mars 2021 (avant le 3ème "confinement")

Un artiste s'expose à la 193 Galerie à Paris, en mars 2021, avant la fermeture des espaces culturels pour cause de... de quoi déjà?!

mardi 9 mars 2021

PÉRÉGRINATIONS AFRICANO-PARISIENNES

Ce n'est pas parce que la fashion week se tient en ligne ou que les musées, restos, boîtes et cafés sont fermés qu'il n'y a rien à faire en ce moment à Paris.

Et puisque les événements prévus lors de la saison culturelle Africa 2020 (https://www.saisonafrica2020.com/fr), reportée, sont finalement passés à l'as, allons dénicher de l'art contemporain africain, bien niché en galeries... 

Qui a dit que la curiosité était un vilain défaut ?

COLOURS OF ABSTRACTION

Un discours pictural novateur, éclatant de vie et mettant en lumière une représentation alternative de l'humain dans toute sa splendide noirceur vient combler notre besoin de gaieté en ces temps difficiles.

Fouzia Marouf, curatrice de l'exposition Colors of Abstraction 2 à la 193gallery.


La galerie 193 offre à voir, jusqu'à fin mars, le travail de 3 artistes, intitulé Colors of Abstraction 2, commissionné par Fouzia Marouf : une street artist marocaine Ghizlaine Agzenaï et un sculpteur de cocotiers ivoirien, Jean Servais Somian y exposent des pièces déroutantes et qui ont le mérite de questionner notre rapport au beau. 


Chez eux, ce qui saute aux yeux, c'est la présence de la couleur, saturée ou primaire, incrustée dans la matière naturelle, le bois, célébrant à la fois la nature et le fait-main, le particulier avec le traitement subjectif de chacune des visions, et l'universel en ce que le rendu parle absolument à tous. 


Qu'on aime ou pas, là n'est pas la question ; il faut savoir contempler pour réfléchir sans nécessairement émettre un jugement, autre que celui-ci : seriez-vous capable d'en faire autant ?

www.193gallery.com

 

AFIKARIS, L'AFRIQUE À PARIS


Autres lieux, autres mœurs : nouvellement installée dans une ruelle parallèle au Centre Pompidou (fermé) à Beaubourg, la galerie Afikaris propose la mise en exergue et en oxymore de deux talents exceptionnels. 

Mad Police (faisant référence à la repression policière violente survenue à Lagos en octobre 2020) by Sejiro Avoseh, courtesy Afikaris.

« Les figures de Sejiro Avoseh, déformées par la violence et l’injustice sont les victimes de leur temps, martyres de l’histoire contemporaine.  Dans le travail du jeune artiste nigérian, l’acte de création lui-même laisse transparaître la violence.  Il déconstruit ses personnages. Il  déchire et brûle ses toiles à certains endroits. La toile devient la victime de cette brutalité créatrice, étendard de ces visages déformés, témoin de son temps et des événements qui déchirent le Nigéria », dit le communiqué de la galerie.

                                           
Le boxeur, partie d'un autoportrait en triptyque de Salifou Lindou, courtesy Afikaris.

Des portraits de Salifou Lindou, quinquagénaire camerounais, émane une douceur due à la technique du dessin par entrelacs réalisés au pastel, mettant en avant la beauté noire dans des scènes apparemment anodines, mais au travers desquelles l'artiste dénonce les mirages de la migration, la corruption des politiciens.

www.afikaris.com
 

CIRCULEZ, IL Y A TANT À VOIR!

Et puis, la 11ème édition du festival de la jeune photographie européenne, dont la devise des organisateurs est « défendre et célébrer l’altérité », propose un focus sur des talents mettant en avant des figures noires, comme ici en sujets de portraits négatifs d'albinos, ou de ces livreurs pris au smartphone, silhouettes obscurcies soumises à la nécessité liée à la course à gagner sa vie (alors qu'on l'a). Très fort, Circulation(s), à savourer en ligne, vous remue les sens!

 


https://www.festival-circulations.com/artiste/autio-miia-3/

 

https://www.festival-circulations.com/artiste/ben-hayoun-laura/

 CE QUI S'OUBLIE ET CE QUI RESTE

Enfin, le Palais de la Porte dorée, ou musée de l'immigration, propose une expo virtuelle, commissionnée par la Marrakchia Meriem Berrada, et mettant en regard 18 artistes contemporains africains. Intéressant, important, inspirant.

https://www.histoire-immigration.fr







DES TALENTS D'ICI CREUSENT UN SILLON POUR LA BONNE CAUSE...

  Comme pour la 1ère édition de PARAGES x P(ART)AGES, le Secours populaire a souhaité valoriser l’accès à la culture sous de multiples form...